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Les interprètes en langue des signes à la une des médias

La pandémie du Covid-19 a eu comme conséquence inattendue une grande visibilité, dans les médias, des langues des signes et des interprètes en langue des signes, ces derniers étant sollicités pour traduire les prises de paroles des autorités sanitaires qui gèrent la crise du coronavirus et ses conséquences.

Ma collègue Émilie Coignon qui est aussi la community manager de l’AFILS (Association française des interprètes et traducteurs en langue des signes) a eu l’excellente idée de faire une veille média et elle nous a régulièrement envoyé des liens vers les articles, les videos présentant les interprètes, leur métier, leur langue de travail…

Je les ai regroupés ci-dessous (en en ajoutant quelques uns). Il suffit de cliquer sur l’image pour voir l’article.

























En plus de ces articles, il existe une playlist sur YouTube recensant les vidéos sur la pandémie du coronavirus Covid-19 accessibles en LSF (langue des signes française) grâce à la présence d’interprètes, de traducteurs, d’intermédiateurs F-LSF ou plus simplement de journalistes s’exprimant directement en LSF : Covid-19 en LSF

A noter enfin que l’AFILS a sorti un dossier thématique « un regard sur l’actu » n°2 : « Interpréter sur le terrain en pleine crise sanitaire ».
Voici le lien pour accéder au dossier : https://docdro.id/TAmOaoA

Verrons-nous beaucoup d’interprètes en LSF dans la campagne présidentielle ?

La semaine dernière, pour la première fois à ma connaissance, un potentiel candidat à l’élection présidentielle, Bruno Le Maire, s’inquiétait de l’accessibilité de la campagne et de ses débats pour les personnes sourdes et malentendantes. Il demandait notamment « une retranscription en langue des signes (sic) […] afin que les personnes sourdes et malentendantes puissent participer pleinement à cette échéance démocratique ».

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Proposition opportuniste pour rallier quelques suffrages supplémentaires ou réelle conviction politique peu importe.

Cette déclaration nous permet de nous rappeler qu’on avait lu en 2012 un article paru dans Ouest-France dans lequel, un journaliste écrivait : « tout le monde vote, y compris les handicapés. Mais tout le monde ne peut pas participer aux meetings. Les réunions de quartier, conférences thématiques ou séminaires qui ponctuent une campagne électorale sont rarement accessibles à tous : sourds, aveugles, personnes se déplaçant difficilement ou souffrant d’un handicap psychique (la claustrophobie, par exemple). La loi de 2005 relative au handicap fait pourtant de cette accessibilité un objectif ».

Notre démocratie s’anime intensément tous les cinq ans, au moment des élections présidentielles puis législatives. À la veille de ces échéances électorales, il est essentiel de souligner l’importance de rendre pleinement accessibles les campagnes des candidats à tous les électeurs. Ainsi que le stipule la Loi du 11 février 2005 pour l’Égalité des Droits et des Chances, la participation et la citoyenneté ainsi que le principe de l’accès de tous à tout s’imposent à nous tous.
Il est donc de la responsabilité de chacun des candidats et mouvements politiques de s’engager à mener une campagne la plus accessible possible. Accessible c’est par exemple, l’accès aux meetings pour les fauteuils roulants, des programmes édités en braille, des professions de foi rédigées en français facile, etc, et bien sur des interprètes F-LSF lors des prises de paroles (à la télé, sous un chapiteau, sur la place du village…).

Pour l’interprétation F-LSF, certains rétorquent parfois que le coût serait obstacle : il faut payer 2 ou 3 interprètes (avec un prix majoré car souvent les meetings ont lieu le soir ou le week-end).
Personne ne nie que la démocratie a un coût financier mais c’est pour cela que l’État français verse des subventions aux partis politiques et rembourse une partie des dépenses pour chaque candidat obtenant plus de 5% des suffrages exprimés (on a vu nos impôts plus mal utilisés).
De plus, si ces exigences sont prises en compte en amont de l’organisation de la campagne, elles entraînent des dépenses limitées par rapport au budget global d’un candidat – même si l’interprète est embauché par Bygmalion. Pour mémoire le fameux meeting de Sarkozy à Villepinte en 2012 fut estimé à 3 millions d’euros, celui de Mélenchon à la Bastille à 80 000€, Hollande et Sarkozy ont chacun dépensé (officiellement) 21 millions d’euros.

Il est aussi essentiel que cet engagement sur l’accessibilité soit partagé par l’ensemble des acteurs de la vie politique française. Sans doute au cours de cette campagne devrons nous traduire de LO au FN, des LR à EELV. Car si nous militons pour la totale accessibilité des débats en contre partie, cela signifie que nous devrons accepter de traduire des discours à l’opposé de nos convictions, que nous devrons nous retrouver sur scène à côté d’hommes ou de femmes politique dont les idées nous effraient.
Ce sera à chaque interprète d’accepter d’y aller ou pas, de se positionner en fonction de sa conscience et de ses propres limites.

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Pour 2016 (en attendant 2017), et même si cette campagne pour l’élection présidentielle ne fait que commencer, on peut dresser un premier bilan.

A la télévision le décompte est simple : zéro. Jusqu’à présent aucun débat télévisé n’a été traduit en langue des signes, aucun meeting retransmis n’a bénéficié de la présence d’interprètes F-LSF.
Pendant ce temps aux Etats-Unis tous les débats ont été traduits en ASL avec un système assez original, un interprète par candidat ou journaliste.

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A la télé française l’accessibilité des débats s’est limitée à des sous-titrages (souvent de piètre qualité et très décalé en raison du rythme soutenu et des fréquentes interruptions, relances…). D’ailleurs, un peu partout sur les réseaux sociaux on pouvait lire les critiques habituelles : « fautes d’orthographe ; ajouts de lettres qui n’ont rien à faire là, ; phrases non terminées ; propos non sous-titrés ; plus de 10 secondes de retard ; les équipes de sous-titrage sont dépassées et n’arrivent pas à suivre le direct ». De plus, il faut rappeler que la majorité des sourds de naissance ont parfois un accès difficile au français écrit en raison d’un système scolaire inadapté et ils ont dû mal à lire les sous-titres qui défilent trop vite (et admettons que c’est lassant de toujours devoir faire l’effort de lire alors que vous pourriez avoir à l’écran une personne s’exprimant dans votre langue maternelle, la LSF).

[À noter le lancement d’une nouvelle appli pour smartphone, Avametrie qui est une plateforme  collaborative d’évaluation de l’accessibilité audiovisuelle. Cette application smartphone permet à chaque téléspectateur de remonter les problèmes de sous-titrage rencontrés lors du visionnage d’un programme télévisé. Cela fera peut-être bouger les choses].

Bref, « le risque de frustration est important. Les handicapés finissent par se désintéresser des enjeux politiques alors qu’ils sont concernés » a déjà averti Jérémie Boroy, de l’Association Aditus, qui a pour objet la promotion de l’accessibilité et qui a comparé l’accessibilité des campagnes électorales précédentes à un « parcours du combattant ».
Il précise d’ailleurs : « on pense parfois à installer des ascenseurs et des rampes pour les fauteuils roulants, mais on veille rarement à ce que chacun puisse comprendre ce qui se passe à l’intérieur de la salle ».

Justement, les meetings politiques, de droite à gauche en passant par le centre.

  • A l’extrême droite, c’est vite vu, le FN n’a jamais mis d’interprète en LSF, ni sous l’ère Jean-Marie Le Pen ni sous celle de sa fille (comme à Brachay en Haute-Marne où elle lançait sa campagne en septembre dernier).
  • Chez Les Républicains depuis le début de la campagne pour la primaire, on a aperçu des interprètes aux meetings de Fillon (à Paris et Sablé-sur-Sarthe), quelques fois à ceux de Bruno Le Maire (aux Docks de Paris), aucun à ceux de Nathalie Kosciusko-Morizet, Alain Juppé et Nicolas Sarkozy.

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  • A gauche hélas, pas grand chose. Mélenchon, pour son rassemblement à Bastille avait bien fait appel à des interprètes mais curieusement à seulement deux, le troisième étant un bénévole nullissime (et incompréhensible). On imagine que cela a permis de faire diminuer les coûts. Mais pas assez cependant car lors du meeting de Lille où était officiellement lancée sa campagne électorale plus rien, ni bénévole nullissime, ni interprète diplômé.
  • A la primaire du PS (qui n’en est qu’à ses débuts) aucun interprète n’a été vu chez Montebourg, Hamon, Lienemann, de Rugy, Filoche…
  • On murmure que Macron qui marche entre la gauche et la droite aurait enfin sollicité des interprètes en langue des signes pour ses derniers discours (à Strasbourg par exemple).
  • EELV, qui marche de moins en moins, a mis les interprètes au vert et aucun des discours n’a été traduit en LSF.
  • Le PCF n’a pas encore trouvé de candidat alors des interprètes…

Quant à Hollande et Valls qui – bien que non candidats (pour le moment) – participent pleinement à la vie démocratique de notre nation, toujours pas d’interprète pour traduire en langue des signes leurs propos. C’est malheureusement une triste habitude pour ce quinquennat qui a été plus que médiocre en matière d’accessibilité « politique » pour les sourds et malentendants (souvenons-nous qu’aucune déclaration d’Hollande lors des attentats de 2015 et 2016 n’a jamais été traduite en LSF). Pour apercevoir un interprète en direct à côté de Hollande il faudra sans doute attendre ses traditionnels voeux du 31 décembre sur France 3.

Autrefois en matière de politique les sourds, par manque d’information, étaient influencés par leur entourage immédiat, souvent ils votaient comme leurs parents. Permettre que  les meetings, les débats politiques soient interprétés en LSF, représente donc un réel progrès. Donc oui, espérons que dans cette campagne pour l’élection présidentielle (puis législatives) nous verrons beaucoup d’interprètes en langue des signes, passerelle entre deux communautés, car ils sont la clé pour que chaque sourd soit un citoyen à part entière, responsable et autonome, libre de ses choix et de son vote.

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© Stéphan – ( i ) LSF

Attentats de Paris : l’info inaccessible

En France, environ 300000 personnes sourdes ou malentendantes ont comme langue maternelle (ou première) la langue des signes française (LSF). Cela correspond au nombre d’habitants de la ville de Toulouse (4ème ville française par sa taille), du département des Vosges ou encore de l’ensemble de la population de la région Corse.
Pour ces personnes, accéder au français oral est impossible. Il n’entendent pas (il est parfois bon de la rappeler) ils ne lisent pas forcément sur les lèvres, surtout quand l’orateur est à la télévision. Par ailleurs, imaginer qu’ils pourraient suivre des reportages télévisés uniquement en lisant des sous-titres qui défilent rapidement est illusoire. D’autant que ces sous-titres (quand il y en a) sont rédigés en direct et comportent de nombreuses fautes d’orthographe, de phrases non terminées, subissent un décalage de plus de 10 secondes avec les images…

Pour cette communauté de « sourds-signeurs », qui s’exprime, qui communique dans une autre langue, la langue des signes française (LSF), une fois encore, les dramatiques événements du 13 novembre, les témoignages des rescapés, les discours politiques, les analyses des experts, les commentaires des journalistes, les mises en garde… tout leur fut inaccessible donc difficilement compréhensible car l’info elle-même n’était pas traduite en LSF.

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J’écris une fois encore, car déjà en janvier 2015, aucune chaîne de télévision n’avait pris la peine de faire traduire en LSF leurs éditions spéciales ou leur JT de 20h.
Une fois encore, car comme en janvier 2015 mais aussi comme depuis des années, aucune communication importante du Président de la république n’est traduite en direct (sauf les voeux du 31 décembre). Aucune de ses déclarations la nuit des attentats et les jours suivants ne fut accessible.
Pareil pour celles du 1er ministre, du ministre de l’intérieur, de la justice ou du Procureur de la république dont les conférences de presse furent retransmises en direct sur les chaines d’info en continu. Il faudra attendre le discours de François Hollande au Congrès pour qu’enfin dans un ridicule médaillon en bas à droite des interprètes apparaissent (mais à mon avis illisibles car trop petits).
C’est pourquoi, une fois encore, il nous faut rappeler que pour cette communauté, seule la présence d’interprètes F-LSF leur permet d’avoir un accès in vivo à l’information télévisée, d’être ainsi des citoyens autonomes dans une société un peu plus égalitaire.
C’est un droit, pourtant, comme le déclare la Convention des Nations-Unies relative aux droits des personnes handicapées qui stipule dans son article 21 : Les personnes handicapées ont le droit à la « liberté d’expression et d’opinion et d’accès à l’information » notamment en « reconnaissant et favorisant l’utilisation des langues des signes ».

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Pour ces sourds français, s’informer est un combat permanent. S’ils ne font pas preuve d’acharnement, ils passent immanquablement à côté de l’information. Nous, entendants, sommes inondés par un flot continu d’infos sonores provenant de médias multiples (radio, télévision, Internet, téléphonie) qui nous permettent plus facilement et plus rapidement de se construire une opinion, tandis que nos concitoyens sourds sont largement sous-informés et en constant décalage par rapport au reste de la société du fait de l’inaccessibilité de certains supports comme la télévision.
Imaginer-vous quelle peut-être l’angoisse de ces adultes, de ces enfants qui voient ces images de terreur, qui lisent les mots : guerre, état d’urgence, victimes, représailles, attentats… sans en comprendre le sens exact, sans avoir accès au contexte, aux explications ?

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Aux Etats-Unis les interventions des responsables politiques, des maires au Président sont traduites en ASL. Pareil en Australie. En Suède les interprètes à la télévision traduisent les chansons de l’Eurovision. En Belgique le journal télévisé de 18h est interprété chaque soir. Piètre consolation pour les sourds français qui peuvent éventuellement se connecter via internet sur cette chaîne pour glaner quelques informations compréhensibles (même si la langue des signes française et belge diffèrent légèrement).

En France rien. Peu ou pas de voix s’élèvent pour dénoncer cette situation. A-t-on entendu Ségolène Neuville, Secrétaire d’État en charge des personnes handicapées protester ? Sa collègue Fleur Pellerin Ministre de la Culture et de la Communication s’en est-elle émue ? Le CSA s’est-il insurgé de cette situation auprès des directeurs des chaînes de télévision ? Quid du Comité Interministériel du Handicap (CIH) ou du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) ? Un silence assourdissant.

Heureusement, face à l’incurie des médias et des pouvoirs publics, des mains se dressent, des personnes, des associations, des initiatives privées apparaissent ici ou là pour rendre enfin accessible cette info, pour suppléer aux manquements de notre État.

C’est le service d’interprètes Tandem, qui, à l’initiative d’Aditevent, a traduit et mis en ligne la première déclaration de François Hollande.

C’est Noémie Churlet ou Claire Garguier, qui postent sur Facebook des vidéos en LSF pour tenter d’expliquer la situation.

C’est enfin et surtout les journalistes Laurène Loctin et Pauline Stroesser qui ont créé la page « Fusillade à Paris en direct LSF« .

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Depuis lundi 16 novembre, des journalistes, des interprètes F-LSF, des monteurs, etc, tous bénévoles, travaillent pour « transmettre l’actualité en langue des signes ». Une vingtaine de vidéos a déjà été publiée : les allocutions du président de la République sont traduites, les analyses faites dans les médias nationaux sont décryptées et délivrées directement en langue des signes. Une véritable rédaction s’est mise en place.

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Dans la vidéo ci-dessous, les deux initiatrices du projet expliquent que « suite aux événements tragiques de ce vendredi 13 novembre à Paris, face à l’absence de médias accessibles en langue des signes, nous avons pris le défi de créer cette page Facebook. »

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Enfin , c’est aussi à nous, entendants, non pas de parler à la place de ces citoyens sourds ou malentendants, mais de porter leur parole, leurs revendications vers les pouvoirs publics, vers les institutions (comme le CSA), vers le gouvernement, vers les responsables des chaînes de télévision pour qu’enfin ils soient entendus et qu’ils aient accès à cette information qu’aujourd’hui la France leur refuse.

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Mise à jour (22/11/2015)

Depuis la date de publication de cet article, d’autres voix se sont élevées.

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  • Marianne Dubois et Elisabeth Pochon, députées, ont adressé un courrier au Président du CSA :

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© Stéphan – ( i ) LSF

 

Journaux télévisés : des mots, des mots, mais peu de signes

Mardi 14 janvier 2014, Marie-Arlette Carlotti, Ministre déléguée aux personnes handicapées et à la lutte contre l’exclusion, déclarait :

« La reconnaissance de la Langue des Signes Française, prévue par la loi, trouve toute sa place dans le secteur culturel. Vous ne vous y êtes pas trompée, Madame la Ministre Aurélie Filippetti, en remettant il y a quelques mois les insignes d’Officier de l’ordre des Arts et des Lettres à Emmanuelle Laborit, directrice de l’International Visual Theatre. Nous devons aussi généraliser l’usage de la Langue des Signes Française à la télévision. Sous l’impulsion du CSA, les chaînes privées, et en particulier les chaînes d’information continue, ont fait de gros efforts en la matière. Désormais, il nous faut aller plus loin, en particulier sur les chaînes publiques pour que les téléspectateurs signants puissent suivre un journal télévisé du soir. Nous ne devons plus, en 2014, considérer la Langue des Signes comme une contrainte éditoriale. D’autres pays ne font plus la fine bouche devant cette accessibilité citoyenne. Le CIH a prévu un groupe de travail qui devra être installé prochainement pour envisager le développement de l’accessibilité télévisée en LSF en utilisant les canaux numériques. Mais l’affichage, pour tous, de la LSF à l’écran reste possible et nécessaire. Soyons fiers de notre Langue des Signes Française et montrons là ! »

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Les adeptes du verre à moitié plein ne pourront que se réjouir de cette annonce.
Enfin, la France, après de nombreux pays comme nos voisins belges (le JT de 19h30) ou suisses (le JT de 19h) se décide à pleinement reconnaître aux sourds le droit à l’information en la rendant accessible, à une heure de grande écoute sur une chaîne publique grâce à la présence d’interprètes en langue des signes française. Mieux, la Ministre, reconnaissant la beauté de cette langue veut qu’elle s’affiche, que nous en soyons fiers et propose… la création un groupe de travail. Soit.

Les contemplateurs du verre à moitié vide remarqueront simplement que lors de la campagne pour les primaires du PS à Marseille, Marie-Arlette Carlotti, pourtant fortement engagée dans le combat n’a jamais fait traduire en lsf ni ses interventions, ni ses discours, que sa campagne malheureusement fut largement inaccessible aux sourds faute d’interprètes.
Les mêmes souligneront surtout que ses voeux en tant que ministre en charge du handicap diffusés actuellement sur son site ne sont ni traduits en lsf ni même sous-titrés en français et ils auront alors l’étrange sentiment que ce discours, récemment prononcé, le fut d’abord pour faire plaisir aux membres de la Commission nationale culture-handicap mais que cela n’ira pas plus loin. Ils sortiront alors de la naphtaline ce fameux adage de Jacques Chirac : « les promesses n’engagent que ceux qui veulent bien y croire ».
Et ils en concluront perfidement que notre ministre devrait s’appliquer à elle-même ses beaux préceptes pour être crédible.
Enfin, ils ajouteront, un peu désabusés, que si déjà, on se décidait à totalement appliquer la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, l’accessibilité à l’information donc à la citoyenneté serait garantie comme le soulignait Jérémie Boroy dans un article de Libération il y a deux ans.

Quant à moi, je rappellerais simplement que déjà, à la fin des années 90, l’ancien Ministre délégué aux personnes handicapées, Philippe Bas affirmait que « l’accès à la télévision est la condition même de la participation à la vie sociale. Informer, divertir, offrir à chacun les clés pour trouver sa place dans la société, pour devenir citoyen et s’ouvrir à la culture de son pays, telles sont les missions de la télévision ». 
Qu’en ce domaine, la situation vécue par les sourds est bien différente de celle des entendants et que s’ils ne font pas preuve d’un certain acharnement, ils passent immanquablement à côté de l’information. En effet, nous, entendants, sommes inondés par un flot continu d’informations sonores provenant de médias multiples (radio, télévision, Internet, téléphonie) qui nous permettent plus facilement et plus rapidement de se construire une opinion, tandis que les sourds ont bien conscience d’être largement sous-informés et en constant décalage par rapport au reste de la société du fait de l’inaccessibilité de certains supports comme la télévision.

Et je conclurais que c’est pourquoi seule la présence d’interprètes F/LSF permettra à la communauté des sourds seigneurs d’avoir un accès in vivo à l’information télévisée, d’être ainsi des citoyens autonomes dans une société un peu plus égalitaire.
La proposition de la Ministre est légitime, son discours fut beau, espérons que les actions entreprises seront à la hauteur des espérances.

 

PS : en septembre 2011 j’avais rédigé une série de textes intitulés : « rendre l’information télévisée accessible aux sourds« .