Étiquette : Emmanuelle Laborit

L’atelier de traduction : féminisme, machisme et sexisme en LSF

L’actualité récente avec la salutaire intervention des FEMEN lors de la manifestation du Front National le 1er mai ou via la une de Libération « Bas les pattes : sexisme et politique : 40 femmes journalistes dénoncent » a remis sur le devant de la scène (pour quelques jours) les termes féminisme, machisme et sexisme.

Lundi dernier, Emmanuelle Laborit, comédienne et directrice du théâtre IVT, était l’invitée de l’émission 28 minutes sur Arte. Elle y a notamment parlé de théâtre, de l’importance de la langue des signes pour les sourds, de citoyenneté, etc.
Vous pouvez revoir l’émission en replay : 28 minutes – 4 mai 2015

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A l’issue de cette émission un journaliste interroge l’artiste sur comment on pourrait traduire en langue des signes française féminisme, machisme et sexisme.
Les réponses et donc traduction d’Emmanuelle Laborit sont savoureuses et tellement visuelles !

Voici la vidéo de ce mini-atelier de traduction plein d’humour :

[feminisme] : c’est le signe pour vulve ou vagin (c’est selon) qui est brandit fièrement comme un étandard au dessus du front.

[machisme] : le mec bien couillu et fier de ses attributs virils ou plus sobrement les grosses moustaches genre bacchantes.

[sexisme] : Emmanuelle Laborit reprend le signe [discrimination] [oppression] qu’elle applique aux femmes.

PS : Vous ne le voyez pas mais vous entendez sa voix : l’interprète F/LSF qui permet ce dialogue est l’excellent Yoann Robert.

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© Stéphan – ( i ) LSF

Ecoutez voir, c’est la radio !

Des interprètes en langue des signes à la radio, à priori, cela n’a rien d’original.

Je me souviens qu’à de nombreuses reprises Emmanuelle Laborit s’est faite interviewée et pour permettre aux auditeurs de suivre ses réponses (et à elle-même de comprendre les questions) une interprète F/LSF était présente, Corinne Gache par exemple lors de son interview sur France-Culture en Avril 2013 pour l’émission « Pas La Peine de Crier ».

Je me souviens également que des interprètes F/LSF ont été interviewés pour présenter leur métier, parler de leur rôle, de ce lien qu’ils créent entre les sourds et les entendants. En novembre 2013, sur Radio-Libertaire, Florence Encrevé, Vincent Bexiga et Christine Quipourt participaient à une émission intitulée « La langue des signes, ses locuteurs, ses interprètes ».

Par contre je ne me souviens pas que des interprètes ont été présents à la radio pour permettre à des « auditeurs sourds » de suivre l’émission.
C’est pourtant cette expérience originale que va tenter RTL lundi 5 Janvier à 15h.

rtl

Animée par Flavie Flament, cette émission judicieusement baptisée « On est fait pour s’entendre » (hahaha ! ) recevra lundi 5 janvier à 15h00, Ronit Leven (vice-présidente de la Fédération Nationale des Sourds de France- FNSF) et Yves Delaporte, ethnologue qui se consacre depuis des années à l’exploration du monde sourd et auteur, en autres, du « Dictionnaire étymologique et historique de la langue des signes française » et de « Les Sourds c’est comme ça ! ».
Grâce à eux, on nous promet de découvrir « la vision que les personnes privées de l’ouïe portent sur notre société ».

Au delà de cet ambitieux objectif, c’est le dispositif mis en place qui retiendra notre attention : l’émission sera diffusée simultanément en langue des signes, grâce à la présence de deux interprètes F/LSF qui seront filmés et retransmis en direct, sur le site de la radio pour permettre au public sourd de suivre l’intégralité des débats. En espérant que l’émission sera visible en replay je la regarderais avec curiosité.

Par chance pour mes collègues ils s’arrêteront à 16h et n’auront donc pas la pénible tâche de devoir ensuite traduire Les Grosses Têtes, animée par Laurent Ruquier, et leurs avalanches de blagues potaches, de jeux de mots navrants car comme je vous l’expliquais récemment, traduire l’humour (qu’il soit bon ou mauvais) est une épreuve quasi insurmontable.

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Mise à jour : 
L’émission a eu lieu, je l’ai regardée, je l’ai trouvée vraiment interessante, non seulement pour la mise en avant de l’interprétation F/LSF via le service Tandem mais aussi grâce aux propos de Ronit Leven.

Pour vous faire une idée voici le Replay :

 

© Stéphan – ( i ) LSF

Art’Pi !

Une fois n’est pas coutume mais je voudrais vous faire part de mon coup de cœur pour ce nouveau magazine accessible uniquement en ligne (car au format PDF) : Art’PI.

Son objectif est de réunir l’Art et le « typique Sourd  » (que l’on traduit en langue des signes par « Pi » – les initiés comprendront).

Vous y trouverez des informations riches et variées sur l’actualité des spectacles vivants, des manifestations, des événements circulant autour de la culture sourde et de la langue des signes.
Ainsi, vous pourrez lire des reportages sur des spectacles mêlant français et LSF, accessibles à tous, sourd ou entendant, grâce au travail spécifique effectué par des interprètes en langue des signes française (LSF).
C’est aussi un support qui permet aux associations, artistes et professionnels sourds ainsi qu’aux professionnels entendants créateur de projets accessibles ou mixtes, de déposer des annonces, de se faire connaître ou de faire connaître leurs œuvres.

Belle mise en page, photographies soignées,remarquables interviews de professionnels sourds ou entendants qui œuvrent dans le secteur culturel, surprenants reportages sur la mode, la télévision, l’art, informations pointues sur les nouvelles technologies, ce magazine est une source d’informations passionnantes sur la culture sourde et ses passerelles vers le monde des entendants.

Bref, vous l’aurez compris, allez vite sur le site de ce nouveau magazine et abonnez-vous, c’est gratuit : Art’Pi Abonnement.
Ou consultez le en ligne grâce à la version feuilletable.

Et voici le sommaire du N°2 pour vous mettre l’eau à la bouche :

L’International Visual Théâtre en danger

International Visual Théâtre (IVT) est un lieu emblématique pour la communauté sourde mais également pour les interprètes en langue des signes française (LSF) qui y interviennent régulièrement, un lieu où se mêlent dans la joie et la découverte sourds et entendants.

Ainsi que l’explique Léna Martinelli sur le site internet Les Trois Coups, « l’I.V.T. est un carrefour culturel, un espace d’échanges et de découvertes où est née une nouvelle approche du spectacle vivant. Première compagnie professionnelle de comédiens sourds, pionnier de l’enseignement de la L.S.F. (langue des signes française), elle œuvre, depuis 1976, à la rencontre entre les cultures sourde et entendante. Depuis plus de trente ans, des hommes et des femmes mettent leurs talents au service d’une mission : transmettre et diffuser la culture de la L.S.F. par des spectacles (ouverts à tous), des ateliers (chaque année près de 900 personnes apprennent la langue des signes à l’I.V.T.), et une maison d’édition ».

Or, aujourd’hui l’existence de ce lieu de cultures est menacée et hier, Emmanuelle Laborit a organisé une réunion d’information dans les locaux du théâtre pour  dénoncer le manque d’intérêt de l’Etat pour cette institution : dès l’inauguration, elle avait rappellé à quel point les subventions étaient modestes, insuffisantes pour assurer la survie d’IVT. Ainsi, souligne-t-elle, « le seul service de l’Etat à soutenir le fonctionnement est la DRAC Ile-de-France à hauteur de 16% du budget global qui s’élève à 1,5 million d’euros« .

En appui à cette revendication, Véronique Dubarry, adjointe (EELV) au maire de Paris chargée du handicap dénonce cette situation dans un billet paru sur le site de Médiapart.

Le voici :

L’International Visual Theatre (IVT), à Paris, est unique: des comédiens sourds s’y expriment en langue des signes. Or son existence de l’IVT est fragilisée par le désengagement de l’État, prévient Véronique Dubarry, membre du conseil d’administration de l’IVT, adjointe (EELV) au maire de Paris, chargée du handicap.

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Emmanuelle Laborit, grande comédienne qui a remporté, en 1993, le Molière de la révélation théâtrale pour son interprétation dans Les Enfants du silence, auteure du Cri de la mouette, livre dans lequel elle relate son combat et sa découverte de la langue des signes, donnera lundi soir, en tant que directrice de l’International Visual Theatre (IVT), une conférence de presse pour tirer la sonnette d’alarme sur la situation de son établissement. Rien que de très banal: les établissements culturels se déclarent les uns après les autres au bord de l’agonie financière et donc tout proches de mettre la clé sous la porte.

Parce que l’IVT, unique en son genre, a un projet qui conjugue projets visuels et corporels et langue des signes française (LSF), la Ville de Paris accompagne ce théâtre depuis sa création. Il est donc possible que les collectivités, suppléant l’Etat, mettent la main à la poche pour venir en aide à ces établissements. Mais la plupart d’entre elles, elles-mêmes au bord de la faillite, ne peuvent qu’assister, désespérées, à la disparition de la culture de proximité pour tous et toutes.

La loi de 2005, jusqu’à ce qu’elle soit récemment sérieusement «rabotée» cet été, a décrété la mise en accessibilité des établissements recevant du public. Mais en ce qui concerne les lieux culturels, l’accessibilité doit aussi permettre aux personnes handicapées d’être les artistes que l’on vient voir. L’IVT fait cela et bien plus. Il permet à des actrices et à des acteurs sourds de se réaliser dans leur passion du théâtre sans pour autant s’enfermer dans une logique qui aboutirait à un théâtre pour les sourds par les sourds. Les spectacles qui y sont proposés, ouverts, mélangent allègrement les acteurs sourds et parlants, proposant des allers-retours entre les deux cultures. Parce que la LSF est une culture. L’IVT lui rend ses lettres de noblesse, langue à part entière, longtemps interdite, encore méprisée.

Des expériences de ce type, mêlant culture et handicap (même si, parfois, le terme même de «handicap» est récusé), il y en a quelques unes, rares. Pourtant, donner à voir le talent des personnes handicapées fait partie de ce que l’on appelle communément le «changement de regard». Si nous voulons que cette diversité puisse continuer à exister, à s’exprimer dans sa différence, nous avons la responsabilité de soutenir ceux qui la font vivre. Le seul effort des collectivités territoriales ne suffira pas à rendre la culture accessible à touTEs. L’engagement de l’Etat doit être une priorité.

Si demain, faute de ce soutien financier, ce type d’expérience innovante, ce genre de lieu devait au mieux survivre, au pire disparaître, c’est autant d’efforts des élus locaux mais surtout des membres d’associations, bénévoles ou salariés, qui resteront vains. Ce sera la mort de la culture pour touTEs qui permet à chacunEs d’enrichir de sa différence une société sans barrière, sans préjugé.

Véronique Dubarry
http://www.mediapart.fr/

Et pour connaître le programme de la saison 2011/2012, cliquez sur l’image ci-dessous: