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Quelques remarques sur le secret professionnel des interprètes

Dans la torpeur de l’été, le sommet américano-russe qui s’est déroulé à la mi-juillet à Helsinki, a été à l’origine d’un débat inattendu sur le secret professionnel des interprètes. En réaction aux propos que le Président américain aurait – ou n’aurait pas – tenus au cours de ce sommet, certains membres démocrates du Congrès ont demandé l’audition de l’interprète du Ministère américain des affaires étrangères (State Department) afin que celle-ci rapporte la teneur exacte des entretiens.

Rappel des faits : dans la capitale finlandaise, les deux présidents Trump et Poutine se sont entretenus pendant deux heures. Seuls deux interprètes étaient présents à leurs côtés et les démocrates estiment que la femme qui a traduit les propos de M. Poutine pour M. Trump –et a vraisemblablement pris des notes– pourrait détenir des informations cruciales sur ce qui s’est dit entre eux. « Nous voulons que l’interprète vienne devant la commission. Nous voulons voir les notes », a dit à MSNBC le sénateur démocrate Bob Menendez, membre de la commission des affaires étrangères.

interprète trump

Face à cette demande, on est tenté – à juste titre – d’opposer les articles des différents codes éthiques et déontologiques qui encadrent la profession d’interprète-traducteur un peu partout dans le monde et qui traitent du secret professionnel.

Deux exemples :
– l’article 2, al. 1, du Code d’éthique professionnelle de l’Association Internationale des Interprètes de Conférence (AIIC), seule organisation représentative de la profession au niveau mondial : « Les membres de l’Association sont tenus au secret professionnel total et absolu. Celui-ci doit être observé à l’égard de quiconque et concerne tout ce qui a été appris dans l’exercice de la profession à l’occasion de réunions non publiques. »
– l’article 1 du titre premier du Code éthique de l’AFILS (association française des interprètes en langue des signes) : « L’interprète est tenu au secret professionnel total et absolu comme défini par les articles 226-13 et 226-14 du nouveau code pénal dans l’exercice de sa profession à l’occasion d’entretiens, de réunions ou de conférences non publiques. L’interprète s’interdit toute exploitation personnelle d’une quelconque information confidentielle.
Le partage du secret ne peut se faire qu’entre interprètes intervenant sur une même affaire, dans l’intérêt du déroulement de la traduction ou de l’interprétation. Les personnes concernées en sont informées lorsque rien ne l’empêche. »

On l’a déjà écrit ici, le but premier du secret professionnel est de protéger le « propriétaire » du secret. Lors d’une consultation médicale, le patient, dans le cas des interprètes ce sont les personnes interprétées, qu’il s’agisse de chefs d’Etat, de diplomates, d’agriculteurs, de designers, de journalistes, de consultants en informatique etc, ou de toute autre catégorie de personnes et professions.

Bien sur, ce secret pourra être levé si l’interprète est, dans l’exercice de son métier, témoin d’un projet de crime ou d’un délit qui, s’il se taisait pourrait être assimilé à une non-dénonciation voire une complicité.
Cependant dans le cas présent, malgré tout le mal qu’on peut penser des politiques nationales et internationales des présidents Trump et Poutine, l’interprète ne se trouve pas dans cette situation et il est inimaginable qu’elle raconte à des journalistes ou des politiques la scène à laquelle elle a participé.

Le secret professionnel est la condition première pour qu’une discussion puisse avoir lieu entre deux parties : avoir confiance dans le professionnel qui traduit et être sur que ses propos ne seront pas divulgués à l’extérieur auprès de personnes n’ayant pas assisté à la réunion. Sans ce principe, aucune rencontre, réunion ne pourrait se dérouler librement en présence d’interprètes, chacun des participants redoutant que ces intermédiaires ne divulguent sur la place publique les propos confidentiels qui auront été échangés.

Pour les interprètes en langue des signes cette règle est d’autant plus importante que nous entrons régulièrement dans l’intimité des personnes sourdes (rendez-vous médical, dans une banque pour l’obtention d’un prêt, chez le notaire pour une succession, au commissariat pour un dépôt de plainte…). C’est d’ailleurs une différence essentielle de notre profession avec celle des interprètes en langues vocales (anglais, russe, chinois…) qui interviennent essentiellement en milieu professionnel.
Il n’est déjà pas facile d’aborder certains sujets intimes en présence d’une tierce personne (l’interprète en l’occurrence). Alors comment imaginer avoir une communication libre et franche par le truchement d’un interprète si on n’est pas sûr que ce dernier n’ira pas répéter ailleurs la conversation ?

Plus généralement, le principe du secret professionnel est consacré dans les législations de nombreux pays. A titre d’exemple, on mentionnera l’article 226-13 du Code pénal français :

 La révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. – ou l’article 458 du Code pénal belge –  Les médecins, chirurgiens, officiers de santé, pharmaciens, sages-femmes et toutes autres personnes dépositaires, par état ou par profession, des secrets qu’on leur confie, qui, hors le cas où ils sont appelés à rendre témoignage en justice (ou devant une commission d’enquête parlementaire) et celui où la loi les oblige à faire connaître ces secrets, les auront révélés, seront punis d’un emprisonnement de huit jours à six mois et d’une amende de cent euros à cinq cents euros.

Hélas, penser que le problème du secret professionnel chez les interprètes serait facilement réglé car encadré par cet article est illusoire. En effet, certains juristes, mais aussi des collègues interprètes, considèrent que notre profession n’est pas concernée par cet article du Code pénal.
Ils soulignent que la profession d’interprète (ou de traducteur) n’est pas une profession d’Etat, qu’il n’y a pas d’Ordre qui régissent notre activité (comme chez les médecins ou les avocats). Nous ne serions légalement soumis au secret professionnel que si nous traduisions une réunion en présence d’une personne soumise légalement à ce secret (médecin avocat…).
Ou si l’interprète est « expert traducteur interprète (ETI) » ces derniers étant un officiel ministériel donc une profession réglementée et protégée qui est soumise au respect du secret professionnel.

Pour revenir à notre collègue placée quelques jours sous les feux de l’actualité on peut craindre de voir désormais se multiplier de telles demandes d’audition d’interprètes dans un monde où un secret quel qu’il soit est une source de frustration pour quiconque n’en a pas connaissance. L’imagination des politiques et des médias ne connaissent pas de limites pour y parvenir.

[Récemment, un journaliste d’un hebdomadaire m’a contacté pour avoir accès aux conversations intimes d’un couple royal : mélangeant un peu tout (peut-être) ou n’ayant pas du tout préparer son sujet (sans doute) il pensait qu’à force de fréquenter des sourds j’avais développé une compétence particulière à la lecture labiale et que je pourrais tout lui raconter. Un extrait de son mail :

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Pour ceux qui ne lisent pas Point de Vue, il s’agissait du mariage d’Harry et Meghan.]

Plus sérieusement, comme le suggère Edgar Weiser, Président de l’Association Danica Seleskovitch, le moment est sans doute venu de réfléchir aux moyens de protéger les interprètes de la même façon dont les journalistes bénéficient d’un régime de protection de leurs sources dans les pays démocratiques. On pourrait imaginer une convention internationale (dans le cadre de l’ONU par exemple) ayant pour objet de protéger les interprètes contre toute action visant à mettre en cause le secret professionnel qui constitue le fondement déontologique le plus important de cette profession.

En attendant, le meilleur conseil qu’on puisse donner est de toujours faire appel à des interprètes professionnels diplômés. Nous avons passé de nombreuses heures à étudier et comprendre les enjeux du code déontologique qui régisse notre profession et nous avons pleinement conscience que le respect des interlocuteurs passe d’abord par le respect de leur discours, qui n’appartient pas à l’interprète, celui ci-se contentant (c’est déjà beaucoup) de le transmettre dans une autre langue puis de l’oublier aussitôt afin de ne jamais le révéler.
Cet engagement moral est sans doute plus fort que toute contrainte légale.

« Fuck you !  » traduisit l’interprète en langue des signes

L’événement se passe au parlement sud-africain.

Le Président Jacob Zuma s’est adressé aux députés. Le chef de l’opposition lui répond et l’accuse après avoir « cassé l’Afrique du Sud » de « casser le Parlement ». La réaction est vive, les insultes fusent et soudain dans ce brouhaha on entend distinctement un « fuck you » crié au chef de l’opposition, John Steenhuisen.

On remarque que l’interprète hésite quelques mili-secondes à traduire l’insulte (00:50″ sur la vidéo). On le comprend car  le signe « fuck you » est non seulement universel mais aussi visuellement facilement compréhensible par tous, sourds ou entendants, petits ou grands. Surtout il sait qu’il est retransmis en direct à la télévision.
Cependant, sans se démonter et en professionnel aguerri il se reprend et redresse fièrement son majeur.

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C’est un bel exemple pour illustrer deux règles essentielles que respectent tous les interprètes professionnels et diplômés, qu’ils travaillent avec des langues vocales ou gestuelles (selon le code déontologique de l’AFILS ou de l’AIIC) :

  • la neutralité : les interlocuteurs sont seuls responsables de leur propos. L’interprète n’intervient pas pour corriger, changer, juger expliquer ou conseiller, il traduit ce qu’il entend ou voit ;
  • la fidélité au discours :  l’interprète se doit de restituer le plus fidèlement le message en présence des parties concernées.

C’est aussi l’occasion de rappeler qu’en Afrique du Sud il y a beaucoup d’interprètes en SASL dûment qualifiés et ultra-compétents (et qu’ils ont été les premiers meurtris et scandalisés par l’épisode du « fake-interpreter » aux obsèques de Mandela).
Pour avoir travailler avec eux à Johannesburg en septembre dernier je peux en témoigner.

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L’AIIC et les interprètes en langue des signes

Comme je vous le signalais dans un billet précédent, Double Sens, la nouvelle revue scientifique autour de l’interprétation, de la traduction et des langues des signes a pour thème de son 1er numéro : « Les interprètes en langue des signes, des interprètes comme les autres ? ». Pour vous donner l’envie de vous procurer et de lire ce 1er exemplaire je vous propose quelques extraits de l’article que j’y ai rédigé sur les relations entre l’AIIC (Association Internationale des Interprètes de Conférence) et les interprètes en langue des signes, ces derniers ayant été admis à en devenir membre en 2012.

logo 03 C’est vers la fin de la Première Guerre mondiale que l’interprétation de conférence est née. Alors que pendant des siècles le français (après le latin) avait été la langue diplomatique internationale, lors des négociations autour du Traité de Versailles (1919) les hommes d’État britanniques, et surtout américains, ne maîtrisant pas cette langue, ont exigé qu’il y ait deux langues officielles, le français et l’anglais. D’où la présence d’interprètes afin qu’ils transmettent la parole, la pensée, pour redire dans l’autre langue officielle les interventions des délégués, en s’exprimant à la première personne. Cette activité, se produisant dans le cadre structuré d’une réunion, fut appelée interprétation de conférence. Elle fut d’abord consécutive, notamment à la Société des nations, puis simultanée au procès de Nuremberg : avec plus de deux langues officielles, la consécutive devenait difficilement supportable. L’interprétation simultanée faisant appel à un plus grand nombre d’interprètes, le besoin d’organiser le métier se fit alors sentir.

Après des initiatives locales, à Genève et à Londres notamment, un petit groupe mené par Constantin Andronikof créa, le 11 novembre 1953 à Paris, l’Association Internationale des Interprètes de Conférence (AIIC). Il s’agissait de créer une association mondiale qui définirait les conditions éthiques et matérielles de l’exercice de la profession d’interprète de conférence et regrouperait aussi bien des free-lances, que des permanents, des salariés, des intermittents… chacun adhérant individuellement à l’organisation centrale. Aujourd’hui l’AIIC est la seule organisation mondiale d’interprètes de conférence, elle rassemble plus de 3000 professionnels établis dans plus de 100 pays. Elle a pour but de représenter l’ensemble de la profession et d’agir au nom de tous les interprètes de conférence. elle assure la promotion de la profession d’interprète de conférence dans l’intérêt à la fois des utilisateurs et des professionnels en fixant des normes, en encourageant de bonnes pratiques de formation, et en faisant respecter un code de déontologie.

Pourtant bien que l’AIIC reconnaisse que les langues sont au cœur de la communication internationale et que la possibilité de dire exactement ce que l’on souhaite dans sa langue maternelle – et de comprendre parfaitement ce que disent les autres – est un droit fondamental, cette association a longtemps refusé que les interprètes en langue des signes puissent y adhérer. En effet, les membres de l’association considéraient les interprètes en langue des signes comme des interprètes « communautaires » travaillant pour une minorité linguistique au sein d’un pays et effectuant des prestations uniquement de type liaison (entretien) ou réunion notamment dans le domaine médical, scolaire ou judiciaire. S’ils participaient à des conférences, là encore elles n’étaient que nationales. Ils n’avaient donc pas ou peu de contacts avec les interprètes de langues vocales, ceux-ci travaillant principalement dans des organismes internationaux ou lors de réunions multi-langues, ils leur manquaient la dimension « internationale » inhérente à cette profession d’interprète de conférence.

Néanmoins, soucieux de mieux connaître les particularismes de cette profession, il a été créé en janvier 2009 au sein de l’association une commission intitulée « Sign Language Network ». Son objet était simplement d’établir puis de maintenir un dialogue avec les interprètes en langues des signes, fournir des informations aux membres de l’AIIC sur les langues des signes et sur les conditions de travail de ces interprètes (formations requises, statuts…). Il s’agissait aussi de créer des liens avec les organisations internationales d’interprètes en langue des signes tel que WASLI (association mondiale des interprètes en langue des signes) ou l’ESFLI (forum européen des interprètes en langue des signes) dont l’AIIC devint membre associé en 2010.

Coopération étroite entre l’AIIC, l’ESFLI et WASLI, participations communes des interprètes de conférence de langues vocales et de langues des signes sur des forums, des réunions internationales, etc., présence accrue de ces derniers dans les médias audiovisuels… Les conditions étaient alors réunies pour qu’ils puissent enfin adhérer à l’AIIC et être reconnus comme interprètes de conférence à part entière.

Cela fut acté le 12 janvier 2012, quand l’association internationale des interprètes de conférence décida lors de son assemblée générale à Buenos Aires que : « L’Association internationale des interprètes de conférence (AIIC) pourra désormais compter des interprètes en langues des signes parmi ses membres. Une coopération étroite et des discussions fructueuses entre l’AIIC et les deux associations représentant les interprètes en langues des signes : l’Association mondiale (WASLI) et le Forum européen (EFSLI) ont permis d’arriver à ce résultat positif pour les deux catégories professionnelles. La décision d’ouvrir les portes de l’AIIC aux interprètes de conférence en langues des signes fut adoptée par une large majorité lors de la dernière Assemblée générale de Buenos Aires et place désormais ces langues sur un pied d’égalité avec les langues orales utilisées dans les conférences internationales. »

Concrètement cela signifie que les interprètes peuvent adhérer à l’AIIC. Pour cela il faut être interprète de conférence et répondre aux critères d’admission.

Cette nouvelle reconnaissance a valu en France à l’AFILS (association française des interprètes et traducteurs en langue des signes) d’être invitée aux célébrations des 60 ans de l’AIIC qui se sont déroulées à Paris, dans les locaux de l’Unesco en décembre 2013. Dans son discours de bienvenue aux membres de l’association, la présidente Linda Fitchett qualifia les interprètes en langue des signes « d’artistes qui parlent avec leurs mains, leur visage et leur corps entier ». Ce fut aussi pour elle l’occasion de rappeler que toute personne a le droit de participer à la vie politique, publique, sociale et culturelle de son pays y compris les personnes handicapées et que toutes les instances, publiques ou privées, ont le devoir de veiller à ce que les services d’interprétation en langues vocales ou visuelles garantissent un niveau de qualité optimum afin de permettre à tous l’accès à l’information dans sa propre langue. Elle en a conclu que travailler ensemble permettrait « d’améliorer toute la profession ».

Cependant, au delà de leurs différences et de leurs singularités, comme l’a exprimé Meei-huey Wang, membre du conseil AIIC France, lors de son discours pour les 60 ans de l’AIIC, en s’inspirant des écrits humanistes de Pic de la Mirandole (1463-1494), ce qui nous unit c’est le mot « interprète » et son préfixe « inter » qui renvoie au statut intermédiaire de l’homme (ni Dieu, ni animal) grâce auquel celui-ci « […] invente le lien entre le connu et l’inconnu du monde, le compréhensible et l’incompréhensible, l’intelligible et l’inintelligible : l’interprète pénètre et éclaire les choses, il s’en fait littéralement l’interprète car il procède à l’interpretatio soit étymologiquement à la révélation des choses cachées, dans un effacement qui est la condition nécessaire et tragique du succès de sa tâche. »

© Double Sens – Stéphan – ( i ) LSF

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Sur le site le l’AIIC, vous pouvez lire une interview de Maya de Wit, première interprète en langue des signes adhérente de l’association : « AIIC’s first sign-language member: Maya de Wit »

Double Sens

Une nouvelle revue scientifique autour de l’interprétation, de la traduction et des langues des signes vient de voir le jour sous la direction de Sandrine Burgat et Florence Encrevé.
Il s’agit de Double Sens, éditée par l’AFILS, dont le 1er numéro (auquel j’ai participé) s’intitule :
« Les interprètes en langue des signes, des interprètes comme les autres ? Premier volume – Théories et techniques ».

Au sommaire vous trouverez les articles suivants :

– Peut-on parler d’une spécificité de l’interprétation français/LSF ? Quelques théories de l’interprétation analysées à la lueur des particularités sémiotiques et culturelles de la LSF, par Sandrine Burgat
– Le décalage au service de l’économie en interprétation de conférence du français vers la langue des signes française (LSF), par Lauranne Chasez
– Les interprètes en langue des signes française dans les textes législatifs et réglementaires, par Pierre Guitteny
– Les interprètes en langue des signes et l’AIIC, par Stéphan Barrère

Ainsi que des comptes-rendus de lectures d’ouvrages et articles portant sur la langue des signes et/ou le métier d’interprète.

Le prochain numéro, à paraître en décembre, portera sur « les formations et les représentations ».

Ci-dessous la couverture du 1er numéro et le bulletin d’abonnement.

Double Sens couverture numéro 1 juin 2014

Double Sens bulletin d'abonnement

© Stéphan – ( i ) LSF

L’AFILS à l’AIIC

Derrière ce titre abscons il faut simplement comprendre que l’Association Française des Interprètes et Traducteurs en Langue des Signes (AFILS), a participé aux 60 ans de l’Association Internationale des Interprètes de Conférence (AIIC) qui se sont déroulés à l’Unesco (oui encore un sigle) en décembre dernier.

A cette occasion, Céline Juillet, vice-présidente de notre Association a pris la parole.
Voici la vidéo de son intervention où elle présente notre métier, son histoire, ses spécificités…

L’interprète, l’humaniste du 21ème siècle ?

« Associées aux trois facultés que l’homme a en partage, pour l’une avec les animaux à savoir les sens – et pour les deux autres avec Dieu – la raison et l’intelligence – la place centrale de l’homme et donc son rôle de « passeur » qu’elle lui confère, le dispose naturellement à l’exercice de l’interprétation.
Comme l’indique le préfixe « inter », l’ « interprétation » s’accorde  au statut « inter-médiaire » de l’homme grâce auquel celui-ci invente un lien entre le connu et l’inconnu du monde, entre le compréhensible et l’incompréhensible, entre l’intelligible et l’inintelligible.
L’homme de l’humanisme pénètre et éclaire les choses : il s’en fait, littéralement, l’interprète car il procède à l’ « interpretatio », c’est à dire, étymologiquement, à la révélation des choses cachées. » 

Extrait du discours Meei-huey Wang prononcé lors la célébration des 60 ans de l’AIIC, inspiré par Jean Pic de la Mirandole et son « Discours de la dignité de l’homme » (1486).

Joli texte pour souhaiter  à
tous mes collègues interprètes/traducteurs
une très belle année 2014 !!!

Ayons aussi une pensée particulière pour les interprètes afghans qui furent les intermédiaires obligés entre les forces de la « contre-insurrection » et la population locale.
En effet, la France actuellement fait preuve de bien peu d’humanité à leur égard, leur refusant des visas pour qu’ils puissent venir s’installer dans notre pays alors que leur vie est menacée.

Le Monde, 03/01/2014 : A Kaboul, le désarroi des ex-interprètes afghans des forces françaises par Frédéric Bobin